Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/304

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l’a réprimandé, il craint toujours de lui avoir fait de la peine :

… Que tout ce que je vous dis ne vous chagrine point : car du reste je suis très content de vous, et je ne vous donne ces petits avis que pour vous exciter à faire de votre mieux en toutes choses.

On voit dans cette correspondance, parmi l’abondance des détails familiers, ce que c’est qu’une famille d’autrefois, chrétienne et disciplinée. Et cela est d’autant plus beau, que les enfants de Racine paraissent avoir été tous des natures originales et que ses cinq filles, toutes jolies et vivaces, eurent, semble-t-il, des âmes singulièrement ardentes. Il écrit un jour de l’aînée, Marie, revenue de chez les Carmélites :

… Elle est toujours fort farouche pour le monde. Elle pensa hier rompre en visière à un neveu de madame Le Challeux qui lui faisait entendre, par manière de civilité, qu’il la trouvait bien faite, et je fus obligé, quand nous fûmes seuls, de lui en faire une petite réprimande. Elle voudrait ne bouger de sa chambre et ne voir personne.

Cette intransigeante Marie, qui avait été novice, aux Carmélites, finit par se marier : âme tourmentée, tantôt à Dieu, tantôt au monde. Nanette fut Ursuline, et Babet aussi après la mort de son père ; Fanchon et Madelon moururent filles, assez jeunes encore et tout embaumées de piété et de bonnes œuvres… Racine sanglotait à la vêture de ses deux aînées, quoiqu’il sût bien que, par les