Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/329

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

vu des fautes qui n’en sont pas. Et c’est la versification la plus souple, et du rythme le plus varié ; les mots importants à la rime ; rimes souvent modestes parce que l’harmonie est dans tout le vers et non dans la rime seule. Et c’est le style le plus beau de clarté, d’exactitude, de justesse, de propriété (qualités redevenues si originales et si rares ! ). Et ce style exprime tout par des moyens si simples ! Souvent, nu et familier, il rase la prose, mais avec des ailes. Et ces vers ont toutes les diverses sortes de beautés, — depuis les vers pittoresques :

Dans des ruisseaux de sang Troie ardente plongée…
La rive au loin gémit blanchissante d’écume,

et depuis les hardis, ceux que signalent des ellipses ou « alliances de mots » jusqu’aux vers suprêmes :

Dans l’Orient désert quel devint mon ennui !

ou :

C’est Vénus tout entière à sa proie attachée !

en passant par la souveraine élégance des périodes rythmées :

Les Parques à ma mère, il est vrai, l’ont prédit,
Lorsqu’un époux mortel fut reçu dans son lit :
Je puis choisir, dit-on, ou beaucoup d’ans sans gloire.
Ou peu de jours suivis d’une longue mémoire.
Mais puisqu’il faut enfin que j’arrive au tombeau,
Voudrais-je, de la terre inutile fardeau,
Trop avare d’un sang reçu d’une déesse,
Attendre chez mon père une obscure vieillesse ;