Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/79

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bohème— et de la gloire— l’entraîna vers le théâtre et lui fit, douze ans entiers, courir la province avec sa troupe vagabonde. Ces douze années, nous ne les connaissons pas ; mais, par ce que nous savons de la province à cette époque, et des préjugés d’alors contre les comédiens, ces douze années durent être rudes et humiliantes. Il avait dû beaucoup souffrir (et souffrit d’ailleurs toute sa vie) dans son orgueil ; et, quand Racine le rencontra, il devait souffrir terriblement dans son cœur ; car il venait d’épouser Armande Béjart, fille de Madeleine, son ancienne maîtresse.

Vous connaissez la Vie de Molière, par Grimarest, publiée en 1705. C’est, en bien des endroits, un roman biographique. Toutefois, Grimarest, né en 1659, avait pu connaître beaucoup d’anciens amis ou camarades de Molière. Il nous dit « qu’il n’a point épargné les soins pour n’avancer rien de douteux » (page 4). Ailleurs, à propos de la brouille de Molière et de Racine, il écrit :

J’ai cependant entendu parler à M. Racine fort avantageusement de Molière ; et c’est de lui que je tiens une bonne partie des choses que j’ai rapportées.

Et Grimarest, sorte de « reporter », cicerone, à Paris, pour les étrangers, dut certainement aussi interroger Boileau (mort seulement en 1711). Je pense qu’on peut assez souvent croire Grimarest. (Je n’en dis pas autant du petit pamphlet, d’ailleurs délicieux, de la Fameuse Comédienne ou Histoire de