Page:Lemaître - Les Contemporains, sér1, 1898.djvu/232

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si, les comme, les d’autant, et ne s’embarrasse point du nombre des qui et des que. Ses paragraphes sont bâtis comme ses périodes : la liaison est presque aussi forte entre elles qu’entre les membres dont elles sont composées. Il fait un usage excellent des car, des mais, des aussi bien, des tout de même que. Il apporte autant de coquetterie à faire saillir les articulations du style que d’autres à les dissimuler. Et l’on peut dire aussi que ses études sont composées tout entières comme ses phrases et comme ses paragraphes. Ce sont systèmes de blocs unis par des crampons apparents.

Ce qu’il y a de remarquable, c’est qu’un mouvement continu anime et pousse ces masses énormes. Je ne sais ce qui étonne le plus chez M. Brunetière, de sa lourdeur travaillée ou de sa verve puissante.

Sa langue, comme son style, nous ramène autant qu’il se peut au XVIIe siècle. Il s’applique à rendre aux mots le sens exact qu’ils avaient dans cet âge d’or. Traiter des questions toutes modernes avec la phrase de Descartes et le vocabulaire de Bossuet, voilà le problème qu’a souvent résolu M. Brunetière.

Cet archaïsme est très savoureux. Et ne croyez pas que vous trouverez cela aisément autre part que chez lui. Je n’apprendrai à personne quelle grande naïveté ç’a été de croire que Cousin parlait la langue du XVIIe siècle ; mais je me figure que M. Brunetière la parle, lui, aussi parfaitement que Bersot parlait celle du commencement du XVIIIe siècle.