Page:Lemaître - Les Contemporains, sér1, 1898.djvu/242

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l’église pour ses fleurs, la musique pour les paroles des romances, et la littérature pour ses excitations passionnelles », etc., ou bien : « Incapable de comprendre ce qu’elle n’éprouvait pas, comme de croire à tout ce qui ne se manifestait point par des formes convenues, elle se persuada sans peine que la passion de Charles n’avait plus rien d’exorbitant », et cent autres passages de même force, je me dis que ce sont pourtant bien là des vues sur l’intérieur d’une âme ! Et quand même ce n’en seraient pas ? Je ne vois pas comment et par où l’observation du « milieu intérieur » est d’un ordre plus élevé que l’étude des effets du dehors sur ce milieu. Avouez au moins qu’il y a bien des âmes où vous chercheriez en vain ce conflit de la volonté et du désir qu’il vous faut absolument. Et ce bon combat, je ne sais, mais je ne vois pas que la description en soit nécessairement une si grande merveille. Il y a des procédés pour cela : chaque fait extérieur éveillera régulièrement chez votre personnage deux sentiments opposés dont il s’agit seulement de varier les proportions, selon les moments, avec vraisemblance et finesse : passion et remords chez Phèdre ; plaisir d’être aimée et peur d’aimer chez Mme de Clèves. C’est quelque chose à coup sûr ; mais c’est quelque chose aussi que de bien noter les effets de l’extérieur sur une âme qui ne lutte pas. La première peinture est-elle plus difficile ? Non (et même l’arbitraire y doit être beaucoup plus fréquent que dans l’autre). Est-elle plus intéressante ?