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Page:Lemaître - Les Contemporains, sér2, 1897.djvu/50

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LES CONTEMPORAINS.


l’Anathème et le Solvet soeclum m’accompagnent, quoi que je fasse, jusqu’au bord de la Bernica. Le poète m’a si bien prévenu contre les mensonges de l’éternelle Mâya que je ne puis croire qu’il s’y laisse prendre. — La Nature, dont il cherche les aspects violents, occupe ses sens et son imagination, mais rien de plus. Ils ne se parlent point, ils n’ont pas commerce d’amour, — car elle n’est ni consciente ni juste, et elle ne saurait aimer. Il ne sent point en elle, comme d’autres, une âme vague, immense et bienveillante : elle lui est un spectacle, non un refuge. Il la regarde, et c’est tout. Mais il la voit si bien et la traduit par des assemblages de mots si merveilleux que cela suffit à le consoler ; et cette consolation est sans duperie.


X

La forme des Poèmes antiques et des Poèmes barbares, on a pu le remarquer déjà, répond exactement au dessein que l’artiste a formé de ne voir et de ne peindre les choses que par le côté plastique. Presque pas de ces mots flottants et de sens incertain qui corrompent la clarté de la vision. Sauf de rares exceptions, les épithètes appartiennent à l’ordre physique, rappellent des sensations, expriment des contours et des couleurs. Il n’y a peut-être que la prose descriptive de Flaubert qui atteigne ce