Page:Lemaître - Les Contemporains, sér3, 1898.djvu/247

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moyen âge la littérature n’a été aussi dégagée qu’aujourd’hui de toute règle ni dans un plus superbe état d’anarchie. Nous sommes revenus à l’absolue liberté, comme avant la Renaissance. — Le réalisme, si en faveur à présent, est chose du moyen âge. — Le roman est aujourd’hui une bonne moitié de la littérature, comme au moyen âge. — Les épopées du moyen âge défrayent notre poésie et notre musique. — La poésie personnelle et lyrique, ressuscitée de nos jours, est chose du moyen âge plus que de la Renaissance et a été presque inconnue des deux derniers siècles ; Musset est plus proche de Villon que Boileau. — Le mysticisme, la préoccupation du surnaturel, l’espèce de sensualité triste dont sont pénétrés si curieusement, en plein âge scientifique, les livres de beaucoup de jeunes gens, ce sont encore choses du moyen âge ; Baudelaire est moins loin que Boileau de l’auteur du Mystère de Théophile. — Les hommes de la première moitié de ce siècle croyaient à une mission providentielle de la France dans le monde, comme les hommes du temps des croisades.

Or rien de tout cela, ou presque rien, entre la prise de Constantinople et la Révolution française…

Mais ces réflexions sont d’une généralité tellement démesurée qu’elles s’évanouissent à mesure que je les exprime. L’auteur de la Poésie au moyen âge les désavouerait certainement, car ce n’est ni de l’érudition, ni de l’histoire, ni même de la critique. Tout