Page:Lemaître - Les Contemporains, sér3, 1898.djvu/300

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et il traite Didier comme un nigaud qu’il est. Sur le divorce et sur les questions qui s’y rattachent, il a des vues d’excellent moraliste et d’homme d’État. Et son bon sens, nourri d’une sérieuse connaissance des hommes, a souvent des hardiesses comme celle-ci, que je recueille sans l’avoir cherchée : « L’idéal trop élevé du mariage est une source de désordres sociaux… »

Volontiers il résoudrait tous les problèmes par l’amour de la femme. C’est une obsession charmante. Si ce néo-Grec, que son culte de la nature n’empêche point de montrer dans les choses religieuses les tolérances tendres et amusées d’un Renan, nous parle d’aventure de l’Assomption ou de la Semaine sainte, il y reconnaîtra les fêtes symboliques de l’éternel amour ; il célébrera l’assomption de la femme, Ève ou Vénus anadyomène, et pleurera avec les belles Syriennes sur le cadavre d’Adonis. Il est vraiment chez nous le dernier prêtre de l’amour. La cité qu’il rêve serait la république des grâces et des jeux ; le courage même y serait un fruit de l’amour ; les femmes y inspireraient l’héroïsme dans la guerre, et elles y conseilleraient les arts de la paix. Sous leur bienfaisante influence, les hommes mettraient un peu de sentiment, d’imagination, de douceur et de pitié dans l’organisation de la société et dans le gouvernement des affaires publiques. Si les hommes savaient encore aimer les femmes, si les femmes connaissaient leur rôle et s’y tenaient pour le remplir tout entier, on aurait une cité idéale, fondée sur la plus délicate in-