Page:Lemaître - Les Contemporains, sér3, 1898.djvu/341

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cornue de nous raconter, dans le rythme sautillant de Remy-Belleau chantant Avril, l’origine de la vie aux profondeurs de la mer :

  C’est en elle, dans ses flots,
        Qu’est éclos
  L’amour commençant son ère
  Par l’obscur protoplasma
        Qui forma
  La cellule et la monère.

Cela pourrait se danser ; c’est bien étrange.

Et le cynisme, la passion de l’ordure dans les mots et dans les images ne paraît point diminuer, il s’en faut. Ce n’est point ma pudeur qui est ici blessée. Lucrèce, quand il nous peint Vénus renversée dans les bras de Vulcain, ne me blesse aucunement. Un grand nombre des phénomènes de la nature semblent appeler la comparaison avec l’acte par lequel se perpétue la race humaine ; je ne sais guère de plus beaux vers que ceux où Virgile symbolise le Printemps par l’accouplement de Jupiter et de la Terre, et certes les traits du tableau ne sont point timides. Mais il y a autre chose chez M. Jean Richepin. La préoccupation des gestes et des attitudes de l’amour physique est chez lui une véritable obsession. Tout, dans l’univers, prend à ses yeux des aspects priapiques. La mer tout entière et chacune de ses vagues, la nuit et chacune des nuées du ciel, autant de prostituées qu’il nous montre à l’œuvre. Sa religion est le panchoerisme et le panphallisme. Cela rappelle la manie de Bouvard