Page:Lemaître - Les Contemporains, sér3, 1898.djvu/50

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On entrevoit ici comment, quoi qu’en puisse dire M. Zola, il n’y a peut-être pas un abîme entre le romantisme et ce qu’il a appelé le naturalisme. Si l’on peut dire que le romantisme a consisté, pour une bonne part, dans le goût du pittoresque à outrance et des effets violents, on conçoit qu’il ait tourné assez rapidement au réalisme ; car, dès qu’il s’agit de forcer l’attention et d’ébranler les nerfs des dégoûtés, l’art qui peint la réalité contemporaine et qui en respecte ou en exagère les brutalités y réussira mieux que celui qui s’attarde aux âges passés ou qui donne aux choses d’aujourd’hui un air de fiction, l’air de « n’être pas arrivées ». — Notez que, d’un autre côté, par son développement naturel, parallèle, semble-t-il, aux progrès du sens critique et à l’accroissement de ses exigences, le roman tendait au réalisme. Le primitif roman d’aventures est devenu roman de sentiment, puis roman de caractères, enfin roman de mœurs et de milieux. C’est-à-dire qu’il est allé serrant toujours de plus près la réalité et le détail de la réalité. Et comme cette marche paraît être dans la nature des choses, il serait bien inutile de s’en fâcher. Un retour en arrière, que quelques-uns espèrent et annoncent déjà, ne serait, je pense, qu’un caprice et une coquetterie de blasés. Et croit-on qu’à part d’honorables exceptions, les romans « idéalistes » qu’on fait encore soient beaucoup plus sains, plus simples et plus consolants que les autres ? Quel singulier mélange de vitriol et d’opopanax nous offrent les derniers ro-