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Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/105

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il voudrait y avoir vécu, avoir été un saint, avoir eu

 Haute théologie et solide morale.

Bref, la foi la plus naïve, la plus soumise ; nous sommes à cent lieues du christianisme littéraire, de la vague religiosité romantique. M. Paul Verlaine a avec Dieu des dialogues comparables (je le dis sérieusement) à ceux du saint auteur de l’Imitation. Il échange avec le Christ des sonnets pieux, des sonnets ardents et qui, si l’on n’était arrêté çà et là par les maladresses et les insuffisances de l’expression, seraient d’une extrême beauté. Dieu lui dit : « Mon fils, il faut m’aimer. » Et le poète répond : « Moi, vous aimer ! Je tremble et n’ose. Je suis indigne. » Et Dieu reprend : « Il faut m’aimer. » Mais ici je ne puis me tenir de citer encore ; car, à mesure que le dialogue se développe, la forme en devient plus irréprochable, et je crois bien que les derniers sonnets contiennent quelques-uns des vers les plus pénétrants et les plus religieux qu’on ait écrits :

  — Aime. Sors de ta nuit. Aime. C’est ma pensée
  De toute éternité, pauvre âme délaissée,
  Que tu dusses m’aimer, moi seul qui suis resté.

  — Seigneur, j’ai peur. Mon âme en moi tressaille toute.
  Je vois, je sens qu’il faut vous aimer. Mais comment,
  Moi, ceci, me ferais-je, ô mon Dieu, votre amant,