Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/307

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comme celle-ci : « Où vas-tu, girl Anglaise de dix-sept ans ?… De passants en passants tu erres, quasi candide, point effrontée, point brutale, et à celui qui te renvoie moins durement que les autres, tu demandes de quoi boire une goutte d’eau-de-vie ; et tout à l’heure, je pourrai te voir debout auprès du comptoir d’un bar, au milieu d’autres filles, jeunes et douces comme toi, parmi des hommes en haillons, et ton visage d’ange exprimera un plaisir naïf tandis que tu videras un large verre de brandy. Puis, tu reprendras ta marche sur le trottoir de plus en plus vide. Où t’en vas-tu, petite girl ? »

Vous voyez bien que je connais l’âme de l’Angleterre ! Et quant à ses paysages, après avoir lu les descriptions de M. Paul Bourget, je les connais aussi. Je les vois très nettement. Et je les vois plus beaux qu’ils ne sont, — si beaux que je ne les visiterai jamais : j’aurais trop peur d’un mécompte.

Il y a un passage du saint auteur de l’Imitation que je cite souvent, parce qu’il me console de mon ignorance de sédentaire, parce qu’il m’empêche d’être dévoré de la plus noire envie quand je pense à ceux qui ont le courage de voyager et de changer d’horizon, comme l’auteur de Cruelle Énigme. Car il est inouï, ce Bourget. Jamais à Paris ! Tout le temps à Oxford ou à Florence, quand il n’est pas à Grenade ou à Sélinonte ! Il est le psychologue errant. Le vrai Touranien, c’est lui, et non pas Jean Richepin !

Voici donc ce passage de l’Imitation. Il est dans