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Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/345

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joué avec l’amour ?… Qui sait si elle ne se souvient pas de son enfance, de sa première communion ? Les filles les plus souillées ont de ces minutes singulières…

À ce moment, Colette se retourne vers Claude et lui murmure impérieusement à l’oreille :

— Agenouillez-vous et priez, je le veux.

Claude obéit sans savoir pourquoi.

Ils sortent de l’église. La comédienne, les yeux encore rouges, dit à Claude :

— Ne vous moquez pas de moi, mon ami. Je ne sais ce que j’ai ; mais vraiment je n’ai guère le cœur à souper maintenant. Ne m’y contraignez pas, je vous en supplie… Oh ! je me connais, et je ne dis point que cette étrange et douce tristesse — ah ! si douce ! — survivra à cette nuit. Mais j’éprouve un grand besoin d’être seule… Accordez-moi cette grâce, vous que j’ai tant fait souffrir. C’est pour cela que je vous la demande : car, si vous saviez ce qui se passe en moi, vous vous en réjouiriez peut-être… À demain !…

Claude se méfie bien encore un peu, étant psychologue de son état ; mais il continue à se demander : « Qui sait ? » Bref, il met Colette dans un fiacre et rentre chez lui, rêveur.

Le lendemain il apprend qu’elle a soupé avec le petit René Vincy à la Maison-Dorée, et qu’elle l’a ramené chez elle.

Sur quoi il écrit un nouveau chapitre, extrêmement féroce, de sa Physiologie de l’amour moderne.