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Page:Lemaître - Les Contemporains, sér6, 26e mille.djvu/230

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Et il paraît que le sage comprit instantanément. Il comprit la partie par le tout :

  La fin justifia la voie et le moyen ;
  Ce qu’il appelait mal, fut le souverain bien ;
  La matière, où la mort germe dans la souffrance,
  Ne fut plus à ses yeux qu’une vaine apparence,
  Épreuve de l’esprit, énigme de bonté,
  Où la nature lutte avec la volonté
  Et d’où la liberté, qui pressent le mystère,
  Prend, pour monter plus haut, son point d’appui sur terre.
  Et le sage comprit que le mal n’était pas,
  Et dans l’œuvre de Dieu ne se voit que d’en bas.

Allons, tant mieux. Le malheur, c’est que c’est seulement d’en bas que nous pouvons, nous, voir l’œuvre de Dieu. Et alors nous concevons sans doute l’utilité de certaines douleurs, et qu’elles sont la condition de l’effort, qui est la condition du mérite. Ainsi s’explique une partie du mal physique. Mais, cette opération faite, il reste tout de même un terrible déchet de douleurs inutiles, et qui n’expient rien et qui ne peuvent être productrices d’aucune bonté. C’est un étrange mystère que la souffrance des petits enfants, pour ne parler que de celle-là. Même, les chevaux de fiacre suffiraient à ruiner les raisonnements de l’optimisme. — Et enfin, que dirons-nous de l’énorme portion du mal moral que l’épreuve du mal physique ne suffit pas à transmuer en bien ? Les méchants qui persistent, les méchants qui doivent demeurer impénitents pourquoi vivent-ils ?…