Page:Lemaître - Les Contemporains, sér6, 26e mille.djvu/255

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conscience individuelle contre les lois écrites, qui ne prévoient pas les cas particuliers, et contre les conventions sociales, souvent hypocrites et qui n’attachent de prix qu’aux apparences. Et c’est aussi, en quelques endroits, le rachat et la purification par la souffrance. C’est, dans nos relations avec autrui, la miséricorde indépendante, le pardon de certaines fautes que le pharisaïsme, lui, ne pardonne pas. C’est, dans le mariage, l’union parfaite des âmes, union qui ne saurait reposer que sur la liberté et l’absolue sincérité des deux époux et sur l’entière connaissance et intelligence qu’ils ont l’un de l’autre. C’est enfin la conformité de la vie à l’Idéal, — un idéal qu’Ibsen ne définit guère expressément, où l’on distingue un peu de naturalisme antique et beaucoup d’évangile, mais d’un évangile orgueilleux et raisonneur, des velléités de socialisme et, presque dans le même temps, la superbe d’un dilettantisme aristocratique et, sur le tout, une couche de pessimisme. Je ne puis mettre dans cette affaire plus de précision qu’Ibsen n’en met lui-même. Mais c’est sans doute dans un sentiment général de révolte que se résolvent les éléments contraires dont son « rêve » semble formé. Bref, Ibsen est un grand rebelle, un homme qui est mécontent du monde et inquiet avec génie.

Or, tout ce que je viens de dire (je ne parle que des idées, puisque c’est de ses idées plus encore que de sa forme que l’on fait honneur à Ibsen),