Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/14

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qui fut éminemment une « pas de chance », et qui eut une âme admirable et un peu de génie. Mais, en outre, la préface de la Correspondance intime nous apporte un renseignement entièrement nouveau, et qui nous fait comprendre l’intensité singulière de certains cris des Élégies, et l’âcreté de quelques-unes de leurs larmes. Nous connaissons aujourd’hui de quelle blessure coulaient ces pleurs de sang. Huit ans avant son mariage, Marceline avait été séduite et abandonnée avec un enfant, qui était mort encore au berceau.

On a dit : — Pourquoi nous révéler ces choses ? Cette femme qui fut pendant quarante ans une épouse et une mère irréprochables, pourquoi nous livrer son douloureux secret ? Laissons dormir les morts. Cette révélation n’a-t-elle pas quelque chose de sacrilège ? Ne ressemble-t-elle pas à une trahison ? — J’avoue ne pas comprendre ce scrupule ni cette indignation, où je trouve quelque chose de convenu et d’oratoire. Je ne les comprends pas, du moment que la postérité de Marceline est éteinte, et que nul vivant ne peut plus être atteint directement par la divulgation de la chute qu’elle fit en l’an 1808 ou 1809. Les morts n’ont de pudeur que celle que nous leur prêtons pour donner bonne opinion de notre délicatesse. Il leur est fort égal qu’on révèle même leurs crimes. Mais il ne s’agit, ici, de rien de tel. Nous savons maintenant que Marceline fut crédule et faible un jour, et qu’elle en