Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/210

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et qu’on ne nous en apprendra jamais rien qui ne soit humain, hélas ! Absolvons les morts en bloc (sauf ceux qui furent méchants). Les pauvres diables étaient comme nous : ils ont fait ce qu’ils ont pu.

— « Mais, s’il n’y a peut-être pas grand inconvénient, quel profit y a-t-il à publier leurs faiblesses ou leurs sottises cachées ? » — Quel profit ? D’abord de menus gains pour l’histoire de la littérature, ainsi que vous l’avez vu. Et puis, tout cela c’est de la vie, de la vie vraie, toute palpitante, et rien n’est plus intéressant que la vie elle-même, fût-ce celle du plus vulgaire des hommes. Or, il s’agit ici de types éminents de notre espèce. N’aimeriez vous pas connaître dans le détail la vie passionnelle de Racine et de Molière ? Mais il y a encore autre chose. Tous ces hommes de génie ont sur nous assez d’avantages ; et notre instinct de justice trouve son compte dans toutes ces divulgations, dussent-elles les rabaisser un peu. Je serai franc : j’aime de tout mon cœur les œuvres des écrivains illustres, mais je n’éprouve pas le besoin de respecter particulièrement leur personne.

— « Mais ce sentiment est odieux ! » — Hé ! non, si je suis d’ailleurs disposé à accorder mon respect à ceux d’entre eux qui le méritent. Il est assez probable que la publication de la correspondance même la plus secrète de Corneille ou de La Bruyère ne les desservirait point : de quoi je me réjouirais sincèrement. Mais enfin si je veux de la vertu, je sais où