Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/296

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meux « droit au bonheur », dont de bouillants Norvégiens lui ont peut-être parlé, est un mot dépourvu de sens pour une chrétienne.

Et Dieu l’en récompense immédiatement, parce que nous sommes au théâtre. Le philosophe Dursay, qui a été le confident de Lia tout le long de la pièce, est vivement touché de cette modeste beauté d’âme. Il fait tout à coup une découverte : « Ma chère Lia, est-ce que vous ne croyez pas que nous sommes, à l’heure qu’il est, encore plus amis que nous ne nous le figurions ? » Et il ajoute : « Une idée me vient, qui n’a contre elle que d’être simple à l’excès et de me venir un peu tard. Mais quoi ? Je m’étais arrangé une vie égoïste et commode, telle que je n’en concevais pas de meilleure… Je m’étais peut-être trompé… » Il supplie donc Lia d’être sa femme ; et Lia le veut bien. Rien ne s’y oppose. Dursay s’était fait passer pour marié, afin, dit-il, d’être tranquille, — et aussi pour qu’on ne pût escompter le dénouement et que Lia ne pût l’entrevoir ou le désirer, même dans le plus secret de sa pensée. En réalité il n’y a jamais eu de Mme Dursay. — Dursay n’a que quarante-cinq ans. Son mariage avec Lia est un mariage d’automne, mais qui n’a rien de déplaisant à envisager.

Voilà l’histoire de Lia. Je me suis laissé entraîner à la conter un peu longuement parce qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Dans quelle mesure j’ai réussi à donner à cette histoire la forme dramatique ; si elle est vraisemblable, si elle est