Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/351

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certain modèle. » Et encore : « Oui, c’est un beau museau ! » Elle dit ironiquement qu’il est « bien fait de sa personne. » Elle dit à Marianne qu’il faut qu’une fille obéisse à son père, voulût-il lui donner un singe pour époux. Le point est donc hors de doute.

Ce premier Tartuffe, au surplus, est une brute. Il n’a aucune finesse. C’est par les artifices les plus grossiers, les plus faciles à percer, les plus impudents, ou, pour mieux dire, les plus naïfs, qu’il a séduit Orgon ; par des momeries de truand de la dévotion, des « soupirs » et des « élancements » à faire retourner les gens, etc… Il a des affectations purement imbéciles, comme lorsqu’il crie à Laurent de « serrer sa haire avec sa discipline », ou lorsqu’il s’accuse d’avoir tué une puce avec trop de colère. Il est si obtus que, voulant se déclarer à une femme jeune, spirituelle, nullement dévote, éminemment « laïque », il y emploie le style des Manuels de piété et ne conçoit pas ce qu’un tel langage, appliqué à une telle matière, doit avoir nécessairement, pour cette jeune femme, de répugnant et de souverainement ridicule.

Bref, Tartuffe n’est qu’un pourceau de sacristie, un grotesque, un bas cafard de fabliau, une trogne de « moine moinant de moinerie », violemment taillée à coups de serpe par l’anticléricalisme (déjà !) du « libertin » Molière.

Mais ce gueux, ce marmiteux, ce goinfre, ce balourd, cet incongru, comment Orgon, homme riche