Page:Lemaître - Les Rois, 1893, éd2.djvu/101

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agir. Les maîtresses, protestantes rigides, se défiaient de cette élève rêveuse, qui était sans doute exacte à tous ses devoirs, mais en qui elles devinaient une indiscipline secrète, une pensée qui leur échappait. La délicatesse de sa beauté et la vivacité de son intelligence excitaient la jalousie de ses compagnes. Peut-être ces fillettes, un peu lourdes, lui auraient-elles pardonné et même auraient-elles subi sa grâce si Frida avait eu l’esprit fait comme elles ; mais la nouvelle venue les irritait, sans le savoir, par de précoces libertés de jugement, des moqueries de jeune barbare sur les « convenances » aristocratiques et bourgeoises, sur celles même qui leur semblaient le plus considérables. Toutefois, on la laissait à peu près tranquille, par égard pour sa naissance et son rang, et l’antipathie générale qu’elle inspirait n’allait pas jusqu’à la persécution.

Mais, un jour, cela changea. Les élèves se chuchotaient un secret ; une conspiration s’organisait sous la direction d’une robuste rougeaude de douze ans, fille d’un président de tribunal. C’était en hiver ; la neige était épaisse. On s’amusa d’abord à édifier une forteresse de neige dans la cour de récréation. Frida, sans défiance, prit part à ce travail. Quand il fut