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Page:Lemaître - Les Rois, 1893, éd2.djvu/312

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goulu et, quand le temps était beau, de se faire mener, dans son fauteuil roulant, sous les arbres de la grande avenue. Pendant des heures, il considérait le décor du lieu, les longues colonnades de la façade du palais, la majesté des bassins et des allées faites pour des cortèges royaux, la géométrie fastueuse des rampes tournantes et des escaliers qui reliaient entre elles les terrasses superposées, le cercle démesuré des nobles statues de marbre dorées par le soleil ou zébrées par la poussière et la pluie, les ouvertures profondes des hautes avenues divergentes comme les rayons d’une étoile et, tout au centre, la colossale statue équestre d’Hermann II, l’aïeul terrible. Il contemplait cela, le vieux roi, comme s’il ne l’avait jamais vu, sans doute afin d’emporter dans la mort la vision des pompes antiques de sa race ; et, parfois, une plainte grêle comme un cri de petit enfant interrompait sa vague extase.

Il ne demandait que fort rarement à voir les princes ses fils. La princesse Wilhelmine, dont il savait l’âme plus conforme à la sienne, était la seule personne dont il parût aimer la présence.

Ce jour-là, il était dans sa chambre, les jambes