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LECONTE DE LISLE.


Puisque ayant quatre fois tes promesses reçu,
L’espoir de ma vengeance est quatre fois déçu,
Et que d’un homme, ô Roi, haut et puissant naguère,
Le plus sage aux Cortès, le meilleur dans la guerre,
Tu ne prends point la race orpheline en merci ! —

La Ximena se tait quand elle a dit ceci.

Hernan répond :
Hernan répond : — Par Dieu qui juge ! damoiselle,
Ta douloureuse amour explique assez ton zèle,
Et c’est parler fort bien. Fille, tes yeux si beaux
Luiraient aux trépassés roidis dans leurs tombeaux,
Et tes pleurs aux vivants mouilleraient la paupière,
Eussent-ils sous l’acier des cœurs durs comme pierre.
Apaise néanmoins le chagrin qui te mord.
Si Lozano Gomez, le vaillant Comte est mort,
Songe qu’il offensa d’une atteinte très grave
L’honneur d’un cavalier de souche honnête et brave,
Plus riche qu’Iñigo, plus noble qu’Abarca,
Du vieux Diego Lainez à qui force manqua.
Le Comte est mort d’un coup loyal, et, tout l’atteste,
Dieu dans son paradis l’a reçu sans conteste.
Si je garde don Rui, fille, c’est qu’il est tien.
Certes, un temps viendra qu’il sera ton soutien,
Changeant détresse en joie et gloire triomphante. —

Puis, cela dit, tous deux entrèrent chez l’Infante.

(Poèmes barbares)


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