aturne, Jupiter, Vénus, n’ont plus de prêtres.
L’homme a donné les noms de tous ses anciens maîtres
À des astres qu’il pèse et qu’il a découverts,
Et des dieux le dernier dont le culte demeure,
À son tour menacé, tremble que tout à l’heure
Son nom ne serve plus qu’à nommer l’univers.
Les paradis s’en vont ; dans l’immuable espace
Le vrai monde élargi les pousse ou les dépasse ;
Nous avons arraché sa barre à l’horizon,
Résolu d’un regard l’empyrée en poussières,
Et chassé le troupeau des idoles grossières
Sous le grand fouet d’éclairs que brandit la Raison.
Nous savons que le mur de la prison recule,
Que le pied peut franchir les colonnes d’Hercule,
Mais qu’en les franchissant il y revient bientôt ;
Que la mer s’arrondit sous la course des voiles ;
Qu’en trouant les enfers on revoit des étoiles ;
Qu’en l’univers tout tombe, et qu’ainsi rien n’est haut.
Nous savons que la terre est sans piliers ni dôme,
Que l’infini l’égale au plus chétif atome ;
Que l’espace est un vide ouvert de tous côtés,
Abîme où l’on surgit sans voir par où l’on entre,
Dont nous fuit la limite et dont nous suit le centre,
Habitacle de tout, sans laideurs ni beautés ;