Entre avec moi ; je vais m’asseoir
Au fond de la vieille tonnelle,
Où tu poses ton chapeau noir
Garni d’un voile de dentelle.
La nuit tombe sur le berceau
Que forme le pâle treillage ;
Tu vois flotter, comme sur l’eau,
Des étoiles dans le feuillage.
Je suis heureux à tes côtés ;
Ravi sans fin par nos tendresses,
J’aime les endroits écartés
Où je trouve encor tes caresses.
Pourtant je suis triste aujourd’hui.
Ah ! je suis triste d’habitude !
Demain mon bonheur aura fui ;
Je garderai ma solitude.
Je voudrais passer la saison,
Sans nul souci de l’existence,
Dans cette petite maison
Que remplirait notre présence.
On nous prendrait tout à loisir
Pour un jeune couple en voyage,
Qui loin de Paris vient jouir
Des premiers temps du mariage.
Les gens ne nous connaîtraient pas,
Nous dont la vie est ignorée ;
On nous servirait nos repas
Sur une table séparée.
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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.