Et vers la Fortune qui passe
Ils regardent les gens courir,
En sachant ce qu’il faut d’espace
Pour aimer, prier et mourir.
e pommier décrépit se penche vers le sol,
Sous le fardeau des fruits et le poids des années ;
Il prodigue son ombre aux frêles graminées
Et couvre le fossé d’un large parasol.
Les oiseaux picoreurs, arrêtés dans leur vol,
L’emplissent de tapage aux claires matinées :
Concert et gazouillis de notes mutinées,
Où chaque moineau-franc se croit un rossignol.
Mousses d’argent, pierrots, pommes d’or et mésanges,
Vie, abondance, espoir, amour, joyeux mélanges !
Dans ton écrasement, pommier, ne te plains pas.
L’honneur est assez grand, si la charge est trop forte.
J’entends le vent d’aval qui murmure tout bas :
« Courage, vieux lutteur, la vigne est bientôt morte ! »