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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.


LE VIEUX CHRIST




Très loin, sous la falaise aux murs profonds et droits,
Le vent berce le cri vespéral des macreuses ;
La lande rousse endort ses ornières ocreuses
Que le soleil couchant fait saigner par endroits.

Seul, vers le ciel morbide où des nuages froids
Trainent avec ennui leurs masses douloureuses,
Debout dans l’herbe rare et les roches lépreuses,
Un Christ exténué tend ses deux bras en croix.

Son socle crevassé sort d’une fondrière ;
Et lui, penchant son front lassé de la prière,
Comme pour être deux se regarde dans l’eau :

Mais l’onde, dont son œil scrute en vain les mystères,
Ne lui montre au miroir que son propre tableau
Et l’immense douleur des âmes solitaires.





CRI DU COQ




La brume s’épaissit. Par minute, une goutte,
Lourde, tombe des toits et claque sur les rocs.
Un vague rayon blanc luit sur le fer des socs ;
L’ombre rêve, immobile, et le silence écoute.