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pide émail de tes clairs yeux éblouis se mirait le vent vert de la forêt. Et avec une peur d’enfant je n’osais pas toujours effleurer la petite onde visible sous la palpitation blonde de ton flanc, le tremblement rosé du remous de ta vie comme si ce n’eût été là qu’une apparence divine. Ma main alors un peu de temps, comme autrefois, planait, faisant une petite ombre pâle à l’endroit du va-et-vient de ta gorge. Et je te disais : « Vois, c’est là ma main sur ta vie profonde, comme si je tenais les coups sonores de ton cœur dans cette main. Ne la sens-tu pas s’appuyer d’un poids lourd et léger d’ombre toujours plus avant dans ta chère vie splendide ? » Elle riait : « C’est ta bouche qui à petites fois vient vers mes seins levés. »

D’abord je la comblai d’un amour sauvage et délicat. Je l’aimai avec l’ardeur violente du rapt, avec un émoi vierge et religieux. Elle connut la colère brandie de l’étalon et l’approche ingénue de l’agneau. Elle tremblait de voir mes prunelles terribles et ensuite celles-ci mollement l’enveloppaient comme