Page:Lemonnier - Adam et Ève, 1899.pdf/98

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rencontre d’une chair et d’une âme avec une autre âme et une autre chair et c’est l’un des mystères du monde. Beauté ! tu étais déjà la petite cellule qui vivait dans le ventre de la première mère et m’était destinée. Ta tribu a marché par les jours et les nuits, par les infinis chemins de la terre, et tu n’étais pas née et cependant tu vivais déjà pour moi. Tu fus toutes les vierges et toutes les mères de ta race avant la dernière qui fut aussi la vierge et puis enfin ! enfin ! te donna le jour. Tu attendais de l’autre côté de la nuit que le flanc sacré d’une vierge et d’une mère se déchirât pour ma naissance à moi aussi et celle-là appartenait à une tribu qui ne connut jamais la tienne. Et à présent tu étais là auprès de moi, dans la forêt ; tu étais là, Ève aimable, chère femme de la Genèse et de tous les âges ! Et peut-être des races nouvelles un jour sortiraient de nous pour le miracle recommencé d’autres hymens à travers la durée ! Toute la vie avant toi et après nous dans la petite chose éphémère et éternelle qui aura ton visage et le mien ! Cependant moi, je