Page:Lemonnier - Ceux de la glèbe, 1889.djvu/104

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Mais elle partait toujours seule, de son grand pas tranquille, regrettant toutefois à présent que Dor la Grosse-Tiesse exagérât sa sagesse. Et un soir qu’il était venu au devant d’elle, tous les deux traversant un bois, qui les écartait du logis, elle plongea dans les siennes ses prunelles froides, en riant :

— Ben, veux-tu qu’ça soit ?

D’abord, elle ne goûta qu’une joie médiocre ; son être s’abandonnait passif, comme déshabitué des grandes secousses de l’amour et elle éprouvait presque la lassitude anonchalie des taures pour qui le temps du rut est passé. Puis, la vigueur de Dor tout à coup réveilla son flanc seulement paresseux. Une fois, dans une crise de larmes, elle s’accusa de sottise pour avoir si longtemps retardé leur plaisir. Fallait-il qu’elle fût bête de s’être contrainte quand le bon Dieu a fait les sexes pour se joindre ? Et c’était, comme auparavant avec Martin, des chauffes de désir qui lui mangeaient les reins ; son sang recuit par le veuvage, toujours fermentait,