Page:Lemonnier - Ceux de la glèbe, 1889.djvu/117

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mangeur lui-même. Quand une fringale le prenait, il attendait que Flavie eût les talons tournés, un peu honteux de son appétit, puis sournoisement se taillait un quignon énorme, qu’il recouvrait d’un doigt de beurre. Mais elle se plaignait avec acrimonie de la diminution du pain : de ce train-là jamais on n’épargnerait assez pour acquérir la maison ; et il lui persuada que, pendant son absence, peut-être Martin se coulait jusqu’à l’armoire. Celui-ci, d’ailleurs, faisait main basse sur tout : il se repaissait des détritus jetés au fumier, dévorait les pommes de terre crues, s’acharnait sur des os, comme un chien. Or, il arriva ceci : vers la fin de l’été, Grosse-Tiesse fut miné par un ténia qui le dévora vivant ; il eût disputé à Martin ses horribles nourritures ; rien n’assouvissait la rage du ver ; et pour équilibrer la dépense, Flavie définitivement supprima la ration de pain qu’elle donnait à l’innocent et qui désormais s’engouffra dans l’estomac de Goffe.

Ce n’était pas leur seule calamité : l’en-