Page:Lemonnier - Ceux de la glèbe, 1889.djvu/131

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D’abord les deux ménages vécurent en bonne intelligence, chacun chez soi, avec le sentiment d’une inégalité dans leurs conditions. Au fond, les Colasse jalousaient l’abondance des Pidoux, et ces derniers, troublés par ce nouveau voisinage dans leur silence de vieilles gens sans enfants, quelquefois étaient pris de mélancolie. L’ancien voisin, un jardinier âgé, très farouche, les laissait en paix, du moins, leur disant à peine bonjour et bonsoir. Lui mort, le logis était resté sans habitants pendant près de deux ans, ce qui les avait accommodés. Et brusquement l’arrivée des Colasse, toute une famille, les avait dérangés dans leurs habitudes. C’était trop de monde à la fois, du bruit, des allées et venues, un tapage de vaisselles remuées. La mère, une chipie, toujours chamaillait ; le père, il est vrai, se distinguait par sa bonace ; mais la fille n’était pas un modèle de douceur ; et certains jours, le gars, rentré saoul, menaçait de tout saccager.

Encore, si dès leur arrivée ils n’avaient