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Page:Lemonnier - Ceux de la glèbe, 1889.djvu/189

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mains croisées sur l’estomac, plein de béatitude. Cependant des silences naissaient de la digestion ; Isabelle, les regards noyés, s’était remise à rouler des mies de pain, avec une palpitation plus rapide de ses seins lourds ; et Michotte avait fini par lui prendre la main qu’il tenait contre sa cuisse, sous la nappe. Puis Mathurin parla céréales, cultures, récoltes ; une de ses terres, longtemps rebelle, avait enfin fructifié ; et il vanta le mâche-fer comme engrais, ayant en vain utilisé avant celui-ci le plâtre, la chaux et le guano. Mais Célestin ne l’écoutait plus, pensant à cette histoire d’alcôve dans laquelle le hasard l’avait jeté et qui toujours ramenait son esprit à la concupiscence d’une belle fille amoureuse et stérile.

Quand le meunier eut absorbé ses deux tasses de café, une somnolence l’engourdit ; il roula sa tête vers l’épaule, les paupières mortes, ouvrant toute grande sa bouche ; et délibérément leurs mains enlacées se haussèrent jusque sur la table. Ils ne cessaient pas de se regarder, souriants tous deux, un