Page:Lemonnier - Félicien Rops, l’homme et l’artiste.djvu/152

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qui resserre en des formats réduits des aspects de petits tableaux complets. Moines et novices, sorcières, petites femmes de boudoirs, nus égrillards, ribambelles d’amours y proposent d’aimables et licencieux sujets où se continue sa veine antérieure.

On le sent en plein épanouissement : il est joyeux de pouvoir travailler librement pour un ami de son art et de son talent. « Je ne tiens à produire que pour quelques personnes avec lesquelles je me sens en communion de pensées, qui ont les mêmes vues artistiques relativement à notre époque et à la modernité et qui jugent de la même façon les hommes, les femmes et les choses de notre temps… » C’est pour lui une occasion de penser à son Musset qui, à cette époque déjà, est sa « marotte ». Il offre de le faire pour M. Noilly avant de le proposer à Lemerre : il établit même les prix, deux cents francs par dessin à raison de quatre par mois. Il ajoute que ce sont là les conditions qui lui sont faites par un amateur de Londres, mais qu’il lui déplaît d’exporter Musset. La négociation le montra entendu en affaires, mais n’aboutit pas. Cent projets du reste, à mesure vont s’enterrer dans le cimetière de ses mort-nés. Il imagine des séries ; sa tête roule Pelion sur Ossa ; il nourrit l’idée d’un recueil d’Œuvres inutiles, qui un peu après se change en Œuvres inutiles ou nuisibles. Il en fait même les frontispices et naturellement, c’est toujours la femme qui en est la muse inspiratrice, dans sa nudité triomphante.

Peut-être les maîtres du nu, les modeleurs de l’argile primitive, en étant plus près de la créature initiale, sont plus près aussi du mystère éternel du monde. L’art, à mesure, en formulant le transitoire, vêtures, détails somptuaires, accessoires d’une époque, anecdotise, particularise et crée l’accidentel dans l’éternel, d’où pour chaque ère naît la modernité. Mais là, dans la forme génésique, il subit et exprime la loi permanente, toute fraîche encore de jeune immortalité. Rops cueillit la fleur féminine à ses origines.