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— Allez, vous êtes bien heureux, disait. Barbe.

— Heureux, je ne dis pas… Et tout de même, il me faudrait là une personne qui aurait de l’éducation et tiendrait sa place dans le monde. Hé ! hé ! je n’ai pas encore dételé, moi, vous savez ! Le cœur toujours comme à vingt ans. Mais on est devenu plus difficile ; situation oblige. Ma première était une brave femme, un peu courte d’idées, mais honnête et travailleuse. Elle a eu le lot le plus dur. La seconde n’aura plus grand’chose à faire et, pour sûr, il ne lui manquera rien. Ah ! que non, il ne lui manquera rien. Toilette, argent et le reste, ce n’est pas moi qui y regarderai. On marierait d’abord les enfants. Une nouvelle femme doit être maîtresse à la maison. Et puis, on ne sait jamais, peut en venir d’autres, faut de la place ; c’est une idée que j’ai comme ça. On fait des folies à tout âge, hon ?

Il ne s’adressait ni à l’une ni à l’autre, parlait dans le vague avec une rondeur bonhomme, les yeux rusés et vermillants, jetant son « hon » d’un coup de menton négligent. Puis, il siffla entre ses dents pour presser le trot des cobs, leur chatouillant le flanc de la mèche de son fouet, et il parut n’avoir rien dit.

Barbe tout à coup regardait Sybille et disait :