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petites gens sans titre pour leur misère orgueilleuse de gens de grande race.

Les chevaux, menés droit, firent la route en moins de deux heures. Le village traversé, on vit se dresser les tours de Pont-à-Leu. Barbe, d’un esprit court, attaché au souci des petites choses, maintenant s’inquiétait pour le coffre et le carton restés en arrière. Mais apercevant Jean-Norbert en train de planter les pommes de terre dans le champ, elle oubliait tout et lui criait de loin :

— Ah ! mon homme, mon bon homme, que je suis donc aise de te revoir ! Sûrement, je serais morte d’attendre plus longtemps. Et comme ça, c’est ta fille et moi que ce bon m’sieu Lechat te ramène dans sa voiture, tu peux bien le remercier. C’est un homme joliment poli et qui ne regarde pas à se déranger pour les gens, ah ben non !

Jean-Norbert, de grosses mottes de terre à ses sabots, arriva serrer la main à Firmin Lechat. Vraiment oui, c’était bien poli à lui, et il le regardait de dessous ses épais sourcils, le visage sournois et humble, répétant toujours la même chose. Il accompagna la voiture jusque dans la cour, caressa les chevaux, puis s’en retourna à sa terre pendant que Lechat, un instant, vérifiait la sangle des sellettes. Jumasse, qui rentrait chercher