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l’hallali

rien, soumis et résigné, le dos en boule comme un hérisson.

— Laisse faire, ma fille, disait Barbe à Sybille. Je connais mon bon homme, sûrement il a son idée.

— Moi aussi, j’ai la mienne.

Visiblement, Sybille se consumait d’un feu qui la rendait farouche et colérique ; son humeur, à mesure plus assombrie, décelait les ravages d’un mal qui était son secret. Une fièvre noire lui cavait les yeux. Sa mère affirma qu’elle avait le foie malade et lui fit prendre une décoction de feuilles que le marchand de vulnéraires à son dernier passage leur avait vendues. Mais le lendemain elle s’avisa que peut-être c’était l’amour qui la tourmentait et comme elle avait trouvé Firmin Lechat fort avenant, elle ne cessa plus dès ce moment de songer aux avantages d’une union qui remettrait les Quevauquant en possession d’une parcelle de leur ancienne fortune. Elle se garda, du reste, d’en parler à Sybille, mais fit avertir secrètement, par Guilleminette, l’ancien intendant qu’on ne serait pas fâché de le voir arriver avec ses poneys à Pont-à-Leu. Cette grosse bonne femme fit là un coup d’état dont personne autour d’elle ne l’aurait crue capable.

Le jour suivant, on entendit le sabot des petits chevaux marteler ce qui restait du pavé dans la