Aller au contenu

Page:Lemonnier - Le Bon Amour, 1900.djvu/75

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sources mêmes de l’être par une communion d’autant plus profonde qu’elle n’éprouvait pas le besoin de s’exprimer. Nous parlions peu ; elle me disait d’un regard ce qu’elle avait à me dire ; et ce qu’elle me disait se rapportait aux autres plus qu’à nous-mêmes.

J’eus ainsi bientôt le sentiment qu’elle commençait seulement d’exister pour moi ; j’étais vis-à-vis d’elle comme un homme qui ne se souvient pas d’avoir connu autrefois la femme qu’il a devant les yeux. L’avais-je vraiment connue avant la minute où elle me révéla son essence véritable ? Et tout le reste ne se bornait-il à des apparences engendrées d’une âme qui s’ignore encore elle-même ? Les âmes, comme les espèces, n’arrivent à la vie qu’à la condition de