Page:Lemonnier - Le Bon Amour, 1900.djvu/96

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tée superstition pour moi s’attachait à ce banc où pour la première fois nous avions lu au fond de nous. Il était comme le point d’une route où, par des sentiers opposés, nous étions venus l’un vers l’autre. Et je lui dis :

— Ô Fréda ! il n’y a pas de plus grande solitude que celle qui entoure deux êtres comme nous. Nous sommes, parmi la vie des êtres, si isolés que nous n’appartenons plus qu’à nous-mêmes. Aucun chemin ne va plus de nous vers le monde. Nous sommes comme des îlots perdus dans l’immensité des eaux. Et peut-être aussi il n’y a pas de plus grand bonheur ; car à présent nous avons cessé de ressembler aux autres hommes, mus par des forces aveugles en dehors de leur volonté.