Page:Lemonnier - Le Mort, 1882.djvu/51

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Ils étaient hâves, éreintés, pareils à des loups d’hiver ; et leur taciturnité avait augmenté. Constamment ils redoutaient de dire une parole qui pût se tourner contre eux : mais leurs oreilles étaient ouvertes aux moindres rumeurs traînant dans l’air. Ils veillaient les nuits, n’osaient plus dormir. Balt s’était réveillé une fois en sursaut, croyant que l’autre était sorti de la mare et lui passait les mains autour du cou. Bast, la veille avait rêvé à haute voix, râlé, crié ; quelqu’un n’aurait eu qu’à l’entendre. Et ils se forçaient à demeurer éveillés sur leurs chaises, cédant par moment à leur éreintement et tout à coup réveillés par le fléchissement brusque de leur corps.

Ils avaient mis un double verrou à la porte, et la nuit, un énorme couteau triangulaire, fraîchement