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Page:Lemonnier - Les Charniers, 1881.djvu/202

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hennir et leur trouaient ensuite le ventre à coups de baïonnette.

Au matin on trouvait les bêtes à terre, raides, la cuisse ou l’épaule dépecée.

D’autre part, cette chair morte ne se digérait pas, enflammait le sang et engendrait des pustules malignes ; il fut défendu d’en manger.

Tant qu’il y avait eu du fruit, on avait donné aux chevaux la cueillette des vergers pour suppléer à l’avoine, à la paille et même au son qui manquaient ; mais on avait fini par garder le fruit pour soi-même et les bêtes n’avaient plus brouté que les sarments de vigne et les écorces d’arbre.

Les chevaux s’abattaient et les hommes restaient en route, tiraillés par la dyssenterie.

Du reste, il n’y eut bientôt plus de fruit : on cessa tout à fait de manger. Le soldat buvait l’eau au creux de la main, dans les flaques de la route.

C’est dans ces conditions que les Français virent se dresser devant eux les canons de la 2e et de la 3e armée.

Celle de Mac-Mahon avait, comme on sait, quitté Châlons le 21 août pour se mettre en