Page:Lemonnier - Les Charniers, 1881.djvu/75

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ble à l’œil nu, et pourtant leurs trois destinées, soudainement brisées, laissaient peut-être derrière elles une idée, une mission ou simplement un labeur qu’aucun autre n’achèverait jamais.

L’éloignement d’ailleurs et l’épaisseur du brouillard ne permettaient plus même de conjecturer au service de quel despotisme ils avaient saigné.

Nous rencontrâmes plus loin des huttes en paille dont la plupart tenaient encore parfaitement et qui étaient construites au moyen de trois piquets réunis en faisceau.

L’eau n’avait pas percé au travers : nous nous reposâmes un instant dans la plus grande, après avoir allumé un feu de brandes auquel nous séchâmes nos habits.

Indubitablement la plaine que nous venions de parcourir avait été le théâtre d’un engagement ; la masse des vivres laissés sur le champ et les fragments d’équipement jetés çà et là pêle-mêle, indiquaient en outre un délogement rapide, compliqué d’une déroute.

Les huttes de paille, au contraire, intactes dans le bouleversement général, semblaient