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Page:Lemonnier - Les Charniers, 1881.djvu/88

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tambour. Voilà plus d’une heure que je me déchire les mains à nettoyer sa petite garde-robe. Il est si gentil, il me parle avec les yeux. Je suis bien triste qu’on m’ait pris notre lit, car j’ai dû lui en faire un avec une table, et ce n’est pas gai de coucher sur du bois. Le pauvre chéri ! Je vous demande un peu : vingt ans ! Ah ! c’est que le mien n’en a pas beaucoup plus, voyez-vous, et on me l’a pris aussi, et quand je soigne celui-ci, je me figure que quelqu’un soignera bien aussi mon garçon, s’il est malade.

Tout à coup on entendit un piétinement devant la maison et la porte s’ouvrit avec fracas. Quatre soldats, à capote grise, entrèrent en gesticulant et en criant, prirent des chaises, déployèrent sur la table une carte de route, et, comme s’ils eussent été chez eux, sans nous regarder ni personne, tous les quatre, penchés sur la carte et l’index en avant, se mirent à discuter bruyamment.

La petite femme prit le plus braillard par le collet et lui montra l’endroit où était son tambour. L’autre regardait, la main sur les yeux, et haussait les épaules, ne comprenant