Page:Lemonnier - Noëls flamands, 1887.djvu/82

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Si Fleur avait la santé de Zéphyrine et d’Annette, certainement il n’y aurait pas lieu de s’inquiéter : mais elle est comme un peu de ouate que le vent souffle avec sa bouche dans l’air.

Et dans toutes les maisons de la ville et des campagnes, les petits enfants des riches et des pauvres dormaient à cette heure, leur tête sur leur bras, rêvant des bonbons et des joujoux qu’ils trouveraient à leur réveil.

Bonne maman Jans avait laissé tomber son tricot sur ses genoux et dormait près du feu, ses lunettes sur son nez. Mais ni papa Jans ni maman Jans ne songeaient au sommeil : tous deux se tenaient devant le lit, les mains jointes, n’osant plus se regarder, de peur de se montrer leurs larmes. Et M. le vicaire, les mains jointes comme eux, se disait :

— La respiration de Fleur est comme la cloche de l’église quand le vent d’été la porte au loin dans la campagne et qu’elle va cesser de sonner.

Fleur-de-Blé respirait si mollement qu’on n’entendait plus par la chambre que le crépitement de l’huile dans la lampe et le ronflement de la grand’maman Jans.

Quand la bonne vieille dame s’éveilla, elle s’étonna d’abord que M. le vicaire fût encore là ; mais sitôt qu’elle eut vu papa Jans et maman Jans à genoux près de Fleur-de-Blé, elle tira son grand mouchoir à carreaux et se mit à pleurer dedans, avec des gémissements de petit enfant.

Justement Fleur-de-Blé s’éveillait et, tout bas, mais ; si bas cette fois que bonne maman, qui avait l’oreille un peu dure, ne put l’entendre, elle murmura :

— Bonjour, saint Nicolas.

Et plus bas encore :