Page:Lemonnier - Un mâle, Kistemaeckers, 6e éd.djvu/149

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traîner dans l’air le bruissement profond des bois, et petit à petit, un assoupissement la raidissait.

Elle s’était blottie contre lui, la tête dans ses épaules sous la chaude enveloppe de ses bras noués autour de sa taille, et ils demeurèrent ainsi longtemps, confondus dans une joie muette de s’appartenir.

À la fin, ses yeux se fermèrent, tournés vers ce brun visage d’homme mêlé au bleuissement de la nuit.

Elle dormit.

Les bras de son amant lui servirent de lit jusqu’à l’aube. Ils étaient élastiques et chauds, mieux que la laine et la plume, et il veillait sur elle, évitant de faire un mouvement. La forme de ce corps imprimé dans sa chair était une volupté continue, dont il ne voulait rien perdre ; et il regardait onduler les pâleurs de sa gorge, avec un plaisir muet, comme la palpitation de son propre amour.

Un peu avant le jour, elle s’étira, et lentement ses yeux s’ouvrirent. Elle le vit comme à travers un nuage, immobile, ses larges dents blanches étalées dans un sourire.

Elle fut un instant à se rappeler. L’aspect des feuillages encore demi-couverts de nuit laissait flotter une stupeur dans ses prunelles. Elle ne savait pas bien pourquoi elle s’éveillait sur les genoux d’un homme, dans un pareil lieu. Puis la mémoire lui revenant, elle cacha sa tête dans ses mains, reprise par la honte. Et lentement, le matin se leva, faisant chanter les oiseaux.

Ils se rapprochèrent de la ferme.

Germaine entendit grincer les gonds des portes. Dans le verdissement du petit jour, une silhouette humaine s’agitait du côté de l’étable. Elle reconnut la vachère. Alors ce furent des adieux pleins de caresses. Tandis qu’elle se glissait, à travers le verger, s’effaçant derrière les arbres, il la suivait des yeux, lui envoyant des baisers