Page:Lemonnier - Un mâle, Kistemaeckers, 6e éd.djvu/173

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dans les fermes, à causer d’affaires. On avait bu de l’eau-de-vie et tout cela l’avait un peu affamé. Il racontait son histoire en riant à chacun de ses mots, l’œil pétillant. Et Hulotte flairant une affaire, riait avec lui.

— J’suis bien malhonnête, dit-il quand l’autre eut fini. J’vous demande pas des nouvelles de mame Hayot. Elle va bien ?

— Sur son ordinaire. Oui, Dieu merci. À part les rhumatisses.

— C’est une personne d’âge ! Elle n’a pas aut’chose que c’qu’ont les autres. L’un a ça, l’aut’ a aut’chose. Moi, c’est dans les reins.

Et le dialogue traînait dans des politesses mutuelles, chacun pensant à la possibilité d’un gros gain.

Germaine étendit un coin de nappe sur laquelle elle rangea un pain de froment, une pleine assiette de beurre, la cafetière, le sucrier et une belle tasse à fleurs, claire comme du cristal.

Hayot déjeuna, se défendant encore et ne voulant accepter qu’une tranche de pain ; ça suffisait bien ; il n’avait pas grand appétit, du reste ; et tout en protestant, il entama une seconde tranche, qu’il beurra largement ; et celle-là engloutie, il planta ses dents dans une troisième. Tout de même, le pain était fameux ; et il complimentait Germaine, en mâchonnant ses bouchées. Il mangea le tiers du pain, râfla tout le beurre et but trois jattes de café, coup sur coup. Après quoi, il passa le bout de la nappe sur sa bouche, avec satisfaction, et se donna de petites tapes dans l’estomac.

— C’est une idée d’être entré, dit-il. Là, je suis fameusement content d’vous avoir vu. On est de bons amis.

Il alluma sa pipe et demanda à voir les bêtes. Hulotte pensa qu’il avait besoin d’un cheval et le mena à l’écurie. Hayot trouva les chevaux magnifiques.