Page:Lemonnier - Un mâle, Kistemaeckers, 6e éd.djvu/177

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— J’suis content, là, fameusement content.

À la seconde bouteille de vin, il reparla de la vache.

— Pour être un homme, ben ! j’donnerai six cents. Mais faut pas m’demander un liard de plus. Ça va-t-il ?

Hulotte tenait bon.

— Non. J’nai qu’une parole.

Alors il haussa les épaules, et clignant des yeux du côté de Germaine, s’écria qu’il n’y avait pas moyen de faire des affaires avec un homme aussi exigeant que le fermier.

Cela traîna jusqu’à la tombée du jour. Le cheval avait été remis à la carriole et piétinait devant la porte, dans la pluie qui continuait. Le bonhomme prit son parapluie, l’ouvrit, se carra sur le banc de la voiture. Hulotte se tenait debout à la tête du cheval, souriant de son sourire tranquille. Et du seuil, Germaine regardait Hayot s’installer, regardant en même temps au-dessus de sa tête, au loin, les bois où l’attendait peut-être Cachaprès.

Hayot prenait ses aises, sans se presser. Il retourna la banquette sur laquelle il était assis, se mit à droite, recula à gauche, rajusta les brides, gagnant ainsi du temps. Hulotte se raviserait peut-être, descendrait à six cents, et il dardait sur lui son œil malin, sans tourner la tête. Mais le fermier parlait de la pluie, continuant à maintenir le cheval qui s’impatientait.

Le bonhomme prit une décision, subitement. Il jeta les brides sur le collier du cheval, ferma son parapluie et descendit de la carriole.

— Là, dit-il, j’la prends pour six cent vingt-cinq.

Et il rentra.

Cette fois, Hulotte céda. Il fut convenu que le Cron, un des domestiques de la ferme, ainsi nommé à cause de la circonflexion de ses jambes, conduirait la vache au Trieu. Il passerait la nuit chez Hayot et repartirait au petit jour.