Page:Lemonnier - Un mâle, Kistemaeckers, 6e éd.djvu/238

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Ils le regardaient décroître dans la profondeur de la route.

Bientôt il arriva aux maisons, longea une haie, s’enfonça sous l’auvent d’une large porte.

Ils continuaient à marcher de leur même pas régulier.

Un sentier s’encaissait entre des talus, un peu avant les maisons. Ils prirent le sentier et débouchèrent sur un chemin charretier. Des habitations basses à toits de chaume s’espaçaient sur les bords du pavé, et plus loin se rapprochaient, finissaient par former une rue au bout de laquelle s’arrondissait un espace découvert qui était la place commune. Au fond, l’église dressait son clocher en poivrière, au milieu d’un cercle de maisons.

La cloche tintait. Ils montèrent les trois marches qui conduisaient au parvis.

Grigol, lui, rôdait pendant ce temps dans la cour du fermier Hayot, cherchant à qui parler.

Il alla à l’écurie, à l’étable, au cellier sans trouver personne, et il cognait aux portes, toussait, appelait, frappait fortement la terre de ses souliers.

— Hé ! y a donc pas un chrétien dans cette barraque ? cria-t-il à la fin, impatienté.

Le torse nu d’un homme se montra à la lucarne du grenier et une voix grommelante demanda « de quoi c’était ».

— Descends une miette, Crollé, j’te bouterai ça, répondit Grigol.

— C’est que j’m’habille, fieu ! dit l’autre, qui passait les emmanchures de sa chemise.

— Hardi ! Dépêche !

Au bout de quelques instants, l’échelle qui menait au grenier craqua, et le Crollé descendit dans la cour, en fixant ses bretelles, ses gros cheveux crépus emmêlés de paille.