V
omme elle l’avait dit à Cachaprès, Germaine était
la fille du garde forestier Narcisse Maucord, tué
par la foudre, il y avait à peu près quinze ans,
dans le bois des Chêneaux.
Elle avait passé la première partie de sa vie dans une maison triste, froidement correcte, en long tête-à-tête avec sa mère, une femme d’ordre qui, à la mort de Maucord, était encore la plus belle femme de la contrée. Le garde passant presque toutes ses journées à surveiller les domaines de l’État, elles demeuraient seules dans cette maison qui attenait à la forêt, regardant à travers les rideaux tirés onduler les arbres, poudroyer le soleil et ruisseler la pluie.
Le père rentrait à midi. Un instant la maison s’animait du remuement des vaisselles ; une apparence de vie bourdonnait sous les plafonds en chêne, le long des murs tapissés d’un papier à fleurs bleues, et la mère, le garde, l’enfant s’asseyaient à la même table, comme étonnés de se trouver ensemble.