Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/147

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II

Au jour convenu, les invités de Guillaume Desmarennes, au lieu de se rendre à l’heure précise du dîner pour se mettre à table, vinrent à Saint-Christophe, suivant l’habitude du pays, vers le milieu de la journée.

Il n’était pas quatre heures à la montre de Guérineau, quand lui et son camarade, à un brusque détour de la route, aperçurent la rivière, entendirent le tic-tac du moulin et hâtèrent le pas en souriant d’aise à la fraîcheur de l’eau mêlée d’une bonne odeur de froment, tandis qu’une flottille de canards s’ébattait bruyamment dans les remous à l’ombre des peupliers frissonnants.

Debout sur le parapet de son premier pont, Desmarennes les reconnut du coin de l’œil, mais ne bougea pas : il avait déjà ramené sur l’épaule un pan de son épervier, avec un des plombs entre ses dents, et guettait sur le fond clair des eaux une honnête friture de goujons.