Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/275

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à mon intention, quand il me plaira d’entrer en ménage. Qu’en dites-vous ? pour ne m’avoir vue qu’une seule fois, toute petite, au berceau, la bouche ouverte et les yeux dormants. Aujourd’hui, comme je n’ai plus de secrets à garder, je puis bien tout vous dire. Mais ne froncez pas le sourcil, et ne vous tourmentez pas d’avance pour des nouvelles qui, après tout, ne sont pas si mauvaises que vous semblez le craindre.

Albert, un peu rassuré, s’établit carrément dans la grande chaise que lui présentait Germaine avec sa bonne grâce habituelle, tandis que son épagneul, qui répondait au nom de Sémillant, allongeait son museau tranquille sur deux pattes, à la meilleure place du foyer.

Albert avait jeté son feutre, et la flamme éclairait sa belle tête bretonne, au profil de gerfaut, corrigé par un doux et profond regard, et une bouche exquise dans sa courbe irréprochable, ombragée d’une fine moustache noire. Il secoua brusquement sa grande chevelure mouillée, et un vif éclair de bonté lui passant dans les yeux :

— Voyons, ma petite Germaine, raconte-moi ce que tu sais. Et d’abord, est-ce à un héritier de l’Anglais que la propriété…

— Non. Cette fois la terre de France est rachetée par un Français.